mercredi 14 novembre 2012

Mon beau sapin 8.0


Dans une chronique de 2008, je disais mon étonnement devant l'arvore de Natal tel qu'il trône chaque année sur la Lagoa Rodrigo Freitas à Rio de Janeiro : 68 mètres de haut, d'acier, de plastique et d'électricité. Bien sûr, tout cela est bien excusable, car il y a très peu de forêts d'épicéas en Amérique du Sud, à vrai dire il n'y en a aucune.
Pendant ce temps-là – faut-il dire « jadis » ? – Bruxelles n'avait à offrir à sa Grand'Place qu'un malheureux sapin fagnard de 19 mètres à peine Bouh ! plein de bois, d'épines et de résine Beeurk ! Couvert de guirlandes, des boules et des jeux de lumières, plus ringards les uns que les autres. Il était bien temps d'y remédier et de se tourner vers l'avenir : une sculpture synthétique digne d'un Minuit Crétin.
L'heure solennelle est donc arrivée, la Ville de Bruxelles a résolu de faire une mise-à-nuit électronique baptisée « sapin 8.0 » et nous a pondu un assemblage de boites blanches, résultat sans doute d'un croisement contre nature entre Légo, panneau publicitaire et navette spatiale. And they all live in little boxes alle the same... chantait Pete Seeger.
On pourra monter dans ces petites boîtes, il paraît que de là-haut, la vue est fantastique, on ne voit même pas la cage à poules qu'on a escaladé ! Cela valait bien une maigre cotisation de 4 euros, qui sera d'ailleurs versée au profit des sans-abris.
N'était-il pas plus simple pour la Ville de mettre les sans-abris dans les boîtes en question, voire de leur verser directement le coût du monstre, 40 000 euros ? et pour Electrabel, en mal de publicité, de nous offrir une petite réduction de facture en cette fin damnée ?
Pour ma part, j'estime qu'il reste beaucoup à faire pour améliorer et moderniser la Grand'Place. Celle-ci n'est avant tout qu'un assemblage de vieux bâtiments de pierre qui seraient avantageusement remplacés par d'autres constructions plus modernes de verre et d'acier, voire de plastique. Les statues de métiers sont d'un académisme affligeant, un peu d'art conceptuel lui donnerait directement un aspect plus futuriste.
Vaste programme à mettre en œuvre en 2013 et 2014, si la Ville a vraiment décidé de donner un coup de jeune (sans abstinence) au cœur de Bruxelles. Mais, me direz-vous, une ville n'a pas de mains, elle ne peut pas signer des contrats, établir des plans, voter. En effet, mais ces jours-ci il est très difficile de rencontrer une personne qui assume la Villénie commise .. La Ville a bon dos !

dimanche 13 mai 2012

Trains d'enfer


Je suis pris d'un certain scepticisme quand je lis les explications des SNCBs (il y a trois sociétés désormais et personne ne s'y retrouve) sur les retards ou même les accidents qui surviennent « régulièrement » (c'est bien les seuls !) dans notre joyeux pays surréaliste.
Les retards, par exemple, sont dus à des phénomènes climatiques toujours imprévisibles et inexplicables tels que le gel (en hiver), la chaleur-qui-dilate-les-voies (en été) ou la chute des feuilles (en automne).
Ainsi, le vendredi 3 février, le train en provenance de Schiphol (aéroport d'Amsterdam) est arrivé avec deux heures de retard à Bruxelles-Midi, qui devint en l'occurrence la gare du Minuit ou presque. Il va sans dire que le retard était dû à la neige étrangère, quoique ... Ayant une espionne à l'intérieur du TGV en question, nous avons appris qu'il avait été bloqué après Rosendael, ce qui situe la panne en territoire belge.
La semaine dernière, le train entre Anvers et Gand est entré en collision avec un lama : l'animal qui crache, pas le moine tibétain. De toutes façons ni l'un ni l'autre n'avaient rien à faire sur la voie : si le lama veut promener son lama, qu'il le fasse en montagne, Andes ou Himalaya, peu importe, mais pas dans les campagnes flamandes. Vraiment, les immigrés exagèrent.
lama tentant de bloquer un train
N'oublions pas dans nos conversations de bistrots l'influence de la crise : elle serait la cause du manque d'entretien des motrices, des wagons, des aiguillages, des feux et autres systèmes de sécurité. Avec pour résultat, des convois qui se précipitent à la rencontre l'un de l'autre, voire même certains qui tentent de copuler sauvagement par derrière et par surprise.
Il n'empêche, je soupçonne dans quelques cas l'intervention du surnaturel : est-il envisageable qu'un train surgi d'une autre dimension se retrouve soudain sur le passage d'un autre ? C'est ce que certains indices pourraient laisser à penser (je promène toujours mes pensées en laisse pour éviter qu'elles ne s'aventurent sur les voies). Le mois dernier ma mère a voyagé en TGV (très gros vortex) entre Bruxelles et Grenoble. À l'aller, son convoi était annoncé quai 4B ... Pourquoi pas le 15 3/4 cher à Harry Potter ?
Les voies du démon sont impénétrables ! Au retour, c'était pire, son titre de voyage annonçait une arrivée en gare du Midi à 12:47, mais le train-zombie ne figurait sur aucun tableau dans la gare.Donc, impossible de savoir où les voyageurs allaient débarquer. Heureusement, instruit par l'expérience (mon frère avait pris le même train-fantôme deux mois plus tôt) j'ai attendu sagement au point de rencontre que le train virtuel déverse ses passagers bien réels, eux.

dimanche 15 janvier 2012

le Couscous de l'éclipse


De même qu'un accident de traduction a donné naissance au « Canard bolognaise », ainsi c'est l'éclipse totale de soleil du 11 août 1999 qui a involontairement (évidemment, les éclipses n'ont pas de volonté) donné naissance à la recette originale que je m'en vais vous présenter aujourd'hui.

Ingrédients

(pour 7 personnes)
2 à 3 tentes - 7 chaises pliables - 1 lampe de poche (facultative mais utile!) - 1 ou mieux 2 bombonnes de « camping-gaz » - 1 éclipse totale de soleil (facultative) - 1 kg de semoule moyenne - 1 gros poulet - légumes de saison, carottes, courgettes, tomates ...- 1 bouquet de coriandre, sel, poivre - Harissa (facultatif) - 2 cuillerées d'huile d'olive - pois-chiches (facultatifs) - une douzaines de glands - terreau de feuilles de chêne - araignées épeires ou faucheux (facultatif).


Préparation (2 heures)
Commencez par installer les tentes dans la forêt de Signy l'abbaye, vu que le camping municipal est overbooké, à chaque éclipse totale de soleil c'est la même histoire ! Disposez ensuite la couscoussière sur le brûleur du camping gaz. Éteignez ensuite le brûleur et retournez en ville chercher le coriandre et l'huile d'olive que vous avez oublié d'acheter.
Revenez au campement si vous le retrouvez (tous les chemins se ressemblent dans cette forêt). Fouillez la caisse de matériel pour en extraire la lampe de poche et une opinel. Découpez le poulet et faites le revenir dans la marmite avec un fond d'huile, découpez de même les légumes et jetez-les dans la marmite.
Stoppez la cuisson pour aller demander de l'eau aux voisins du campement. Ils n'ont hélas que de la bière, et encore, ils ont déjà vidé deux bacs de Jupiler et ont l'alcool dragueur et grossier. Prenez alors le bidon dans la voiture et retournez à l'entrée de Signy pour demander de l'eau à la station Total. Revenez au campement en vous orientant sur les chants grivois des voisins complétement pétés.

Cuisson (2 heures)

Allumez la lampe de poche, la nuit est tombée depuis longtemps et il fait plus noir que dans le cœur d'un huissier de justice. Rallumez le camping-gaz, ajoutez un litre d'eau aux légumes de la marmite pour faire le bouillon. Avec le reste d'eau, humidifiez légèrement la semoule et déposez-la dans la passoire (partie supérieure de la couscoussière). Utilisez un torchon (votre chemise fera l'affaire ) pour rendre étanche le joint entre la marmite et la passoire.
Si tout se passe bien, la vapeur du bouillon viendra mouiller et cuire la semoule dans la passoire. Laisser mijoter pendant une heure, en vous laissant bercer par les chansons à boire hollandaises ; mais ne vous endormez pas, il y a encore du boulot !
Avec une fourchette (les doigts si vous n'avez pas peur de vous brûler), décollez ensuite les grains de semoule qui ont fait des grumeaux. Hurlez si vous vous brûlez. Sinon, hurlez seulement lorsque vous renversez la marmite et son premier étage. Appelez à l'aide pour essayer de récupérer les légumes, le poulet et la semoule répandus dans la forêt obscure. Insistez (vainement, car il n'y a qu'une seule lampe de poche)) pour que l'on fasse bien la distinction entre ces ingrédients et l'humus (terre, feuilles, glands, bestioles) qui composent l'essentiel du terrain.

Service

Mettez le tout dans un plat et servez tel quel : vu l'heure avancée, les participants sont affamés et ils trouveront cela délicieux, surtout si vous réussissez à les convaincre qu'on a soigneusement éliminé toutes les saletés qui parsèment la forêt de Signy l'abbaye. Évitez de boire pour ne pas faire gonfler la semoule dans votre estomac ; de toutes façons, il n'y a plus d'eau et les Hollandais se sont écroulé après avoir épuisé la Jupiler.