On se souvient du célèbre
mot de Cambronne (pas celui là, l'autre) : « La gare demeure,
mais ne se rend pas ». C'est donc au train de se déplacer,
pour relier les gares entre elles. Pas si simple pourtant. Si l'on en
juge par l'expérience belge, en effet, de multiples causes peuvent
empêcher ou freiner la circulation des trains. Car, si les voies du
Seigneur sont impénétrables, on ne peut pas en dire autant de
celles des chemins de fer.
Ainsi notre climat tempéré
mais surtout capricieux affecte régulièrement le rail belge :
la pluie inonde les voies ; le vent dresse des barrages d'arbres
contre les express qui du coup se transforment en tortillards ; à
l'automne, les feuilles de ces mêmes arbres (enfin, ceux qui ne sont
pas déjà tombés sur les caténaires) bloquent les aiguillages,
comme le gel et la neige en hiver ; certains trains se
retrouvent ainsi détournés sur La Paz ou Lhassa, où ils risquent
alors d'être confrontés à des lamas. En été, la chaleur dilate le
métal ce qui entraîne des déraillements bien pires que sur les
Chroniques-t-amères ...
La malveillance des hommes
apporte aussi son lot de désagréments : il y a les suicidés,
qui prennent un malin plaisir à traumatiser les cheminots –
heureusement, de par la sélection naturelles, les suicidaires sont
chaque jour moins nombreux ; il y a les conducteurs de trains
qui se mettent en grève pour le moindre suicide ; il y a les
voleurs de cuivre qui profitent de la moindre grève pour piquer les
câbles, parfois même des transformateurs ; il y a les sales
gosses qui jettent des cailloux sur les voies, les wagons ou les
machinistes ; il y a les automobilistes qui traversent la voie
malgré les barrières et les feux ; des piétons aussi – il
est difficile de faire la différence entre ceux-ci et les suicidés ;
il y a les plaisantins qui tirent le signal d’alarme alors qu'il
n'y a ni suicidé, ni lama, ni voiture sur les voies.
Et pour freiner ou arrêter
la circulation des trains on peut encore compter avec les animaux
domestiques (chiens, vaches, poules, moutons, lamas) ou sauvages
(panthères des neiges, pandas, sangliers, cerfs, lamas) qui
cherchent un raccourci pour rejoindre qui leur maître, qui leur
ferme, qui leur cirque ou leur zoo.
(Pour les lamas, je ne
sais exactement dans quelle catégorie les mettre. Chacun a entendu
parler du train de Gand stoppé par un lama, mais le doute persiste
encore, est-ce un lama andin, un lama tibétain ou un Lama Serge ?
Ces trois sortes de lamas ont cependant un comportement différent
lorsqu'ils rencontrent un convoi : le lama tibétain l'évite en
lévitant, le lama andin crache et le Lama Serge crie « je suis
malade » avant même d'être blessé.)
Tous ces facteurs ne sont
pas tous facteurs, il y a aussi des représentants de commerce, des
postiers, des chanteurs, des cheminots et des ingénieurs de la SNCB.
Ces derniers se sont mis au travail pour améliorer la ponctualité
des trains et ont fait deux propositions révolutionnaires :
- Pour que les trains arrivent à l'heure, cela peut aider qu'ils partent à l'heure.
- S'ils sont systématiquement en retard, il suffit de changer l'horaire.
Élémentaire, mon cher
Stevenson !
Bibliographie :
Victor Hugo La légende
des siècles
Hergé
Le temple du soleil
Hergé
Tintin au Tibet
Audit
de la SNCB Les trains et leur train-train.
Le
Soir divers numéros de 2013
Serge
Lama Les p'tites femmes de Pigale